URBANISATION & CONTINUUM TERRE-MER
Vers une GEstion INtéGRée
ZOOM SUR LE RUISSELLEMENT
L’étalement urbain est la cause de nombreuses perturbations pour le milieu marin. Les activités humaines (transports, construction, activités économiques) génèrent des polluants qui s’accumulent sous forme de dépôts. Par temps de pluie, les ravines et autres eaux de ruissellement peuvent être particulièrement polluées par le lessivage des sols et des surfaces imperméabilisées (routes, parkings, toits, …), et par la remise suspension des dépôts sauvages et autres déchets.
Proposé par la DEAL dans le prolongement du projet Gestion Intégrée de la Mer et du Littoral (GIML), un partenariat entre plusieurs acteurs a poursuivi une partie du travail scientifique pour mettre en lumière le phénomène du ruissellement et ses conséquences à La Réunion.
L’objectif est à la fois de sensibiliser un large public sur cette problématique et de promouvoir l’équilibre entre les différents usages et activités sur le territoire, dans une perspective de d’aménagement maitrisé et de protection des populations.
2x plus de surface artificialisées entre 1984 et 2016
sur le bassin versant de la ravine Saint-Gilles
de 285HA à 600HA
MéTHODOLOGIE
Ce travail mené par un groupement d’experts du CIRAD et de l’Université de La Réunion a permis de capitaliser sur une modélisation du ruissellement menée dans le cadre du projet GIML, en améliorant la prise en compte de différents phénomènes physiques dans un logiciel dédié (réalisé avec Ocelet) :
- L’infiltration de l’eau dans le sol, selon le type de sol ;
- Le phénomène de vidange de réservoirs sol vers le sous-sol ;
- L’évapotranspiration de la végétation qui puise dans le réservoir sol ;
- Le ruissellement des eaux de surface dont la vitesse dépend de la pente, de l’épaisseur de la lame d’eau et de la rugosité de surface liée à l’occupation du sol.
A partir de données de changement d’occupation du sol fournies par l’AGORAH, des expériences de simulations consistant à reproduire un même épisode pluvieux sur deux ravines (Ravine Saint Gilles et Ravine de l’Ermitage) ont été menées pour mesurer les débits sortant de ces deux ravines.
Le choix de ces ravines n’est pas anodin puisqu’elles concentrent un condensé des enjeux du Territoire de l’Ouest de la Réunion. Par ailleurs les bassins versants de ces deux ravines ont des caractéristiques proches.
Ces données d’occupation du sol ont été produites à partir des connaissances disponibles à trois dates et estimés sur un scénario projeté à 2030 :
- 1957 => correspondant à une situation historique ou l’urbanisation du territoire était quasi nulle ;
- 1984 => ou l’urbanisation du bassin versant de la ravine Saint Gilles était de 285ha;
- 2016 => ou l’espace urbain représentait 600 ha ;
- 2030 => ou celui-ci pourrait couvrir une surface de 800 ha s’il consomme l’ensemble des espaces d’extensions possibles.
Ces simulations s’appuient et sont vérifiés par des débits mesurés à l’embouchure de la ravine Saint Gilles. Même si le manque de données spatialisées sur la ravine de Saint-Gilles (mesures de débit en plusieurs lieux), et l’absence de mesures sur la ravine de l’Ermitage ne permet pas de valider quantitativement les résultats des simulations sont assez parlants pour illustrer les effets du changement d’occupation du sol sur l’infiltration et le ruissellement.
Occupation du sol 1957
Episode pluvieux de mars 2010 simulé sur une occupation du sol de 1957, visualisation des débits sortants
Occupation du sol 1984
Episode pluvieux de mars 2010 simulé sur une occupation du sol de 1984, visualisation des débits sortants
Occupation du sol 2016
Episode pluvieux de mars 2010 simulé sur une occupation du sol de 2016, visualisation des débits sortants
Occupation du sol projetée pour 2030
Episode pluvieux de mars 2010 simulé sur une occupation du sol projetée pour 2030, visualisation des débits sortants
Analyse
Il en ressort des volumes d’eau de l’ordre très différents entre la situation de 1957 et la situation actuelle. Par exemple sur la ravine de l’Ermitage :
- Avec l’occupation du sol de 1957 et pour un même épisode pluvieux, les débits maximum constatés sont inférieur à 2,5 m3/s ;
- Ceux–ci atteignent 12m3/s avec l’occupation du sol actuelle c’est-à-dire des volumes d’eau jusqu’à 6 fois supérieur;
- Les résultats projetés sur 2030, donneraient des débits maximums supérieurs à 20m3/s soit presque deux fois plus important qu’aujourd’hui.
Au-delà des données chiffrées, le détail des courbes représentant les débits fait apparaitre des pics de plus en plus accentués en fonction des périodes. En effet, dans la situation de 1957, le pic d’un épisode pluvieux sur les débits sortant était lissé dans le temps avec des débits soutenus sur une temporalité de plusieurs heures.
Aujourd’hui le pic de l’épisode pluvieux est beaucoup plus marqué et brutal avec un débit maximal très supérieur pendant un temps très court et un retour au débit initial beaucoup plus rapide.
On peut ainsi consater que l’artificialisation des terres ne permet pas à l’eau de pluie de s’infiltrer correctement et celle-ci ruisselle d’autant plus vite vers son exutoire direct qui est la ravine et par extension la mer (en l’occurrence le lagon).
Il est ainsi clairement démontré que l’artificialisation des sols, conséquence de l’étalement urbain, à un impact direct sur les rejets d’eau en mer perturbant ainsi l’équilibre du milieu récepteur (la mer, le lagon).
PRéCONISATIONS
Les épisodes de fortes pluies fréquents à La Réunion et leurs répercussions nous montrent l’urgence pour les décideurs d’intégrer la problématique du ruissellement dans leurs logiques de gestion territoriale et de prévention.
Parallèlement, il est également indispensable de traduire dans les documents d’urbanisme de nos communes l’équilibre entre les espaces urbains, agricoles et naturels comme cela est prescrit dans notre Schéma d’Aménagement Régional pour ne pas accentuer ces phénomènes de manière irréversible dans les prochaines années.
La loi Alur est venue renforcer la prise en compte des eaux pluviales dans les documents d’urbanisme. L’’article R. 151-49 prévoit, dans une optique de prévention des risques naturels prévisibles, que le règlement peut fixer les conditions permettant de limiter l’imperméabilisation des sols. L’objectif est d’assurer la maîtrise du débit et de l’écoulement des eaux pluviales et, le cas échéant, prévoir des installations de collecte, stockage et traitement de ces eaux pluviales dans les zones délimitées en application de l’article L. 2224-10 du CGCT.
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